Identifier précisément le moment où l’on bascule de l’usage « normal » à un usage pathologique des écrans n’est pas chose facile.
La raison principale en est que pour ce type de problèmes comportementaux, il n’est pas pertinent de définir un seuil, un nombre d’heures à partir duquel on entrerait dans une zone à risque…
En effet, l’excès ne peut être réduit à ce qui dépasse le nécessaire, mais doit plutôt être défini en fonction de son impact sur la vie de chacun.
Existe-t-il des critères scientifiques pour évaluer l’usage excessif des écrans ?
Un grand nombre de psychiatres ont essayé de définir les critères permettant de poser le diagnostic de l’usage pathologique des écrans connectés.
Parmi eux, le docteur Young [1], établit un parallèle entre ce type de pathologies et les jeux de hasard et d’argent qui seraient tous deux liés à un désordre du contrôle des impulsions.
Sur cette base, elle propose un questionnaire d’évaluation fondé sur huit critères (le fait d’être concerné par au moins 5 critères impliquerait un usage problématique d’Internet) :
- Préoccupé par Internet.
- Besoin d’utiliser l’Internet de plus en plus longtemps afin d’être satisfait.
- Efforts répétés mais infructueux pour contrôler, réduire ou arrêter l’utilisation d’Internet.
- Agitation ou irritabilité lors des tentatives de réduction ou d’arrêt de l’utilisation d’Internet.
- Demeure en ligne plus longtemps que prévu.
- Mise en danger, ou risque de perdre une relation affective importante, un emploi ou des possibilités d’étude ou de carrière à cause d’Internet.
- Ment à sa famille, à son thérapeute ou à d’autres pour dissimuler l’ampleur réelle de son utilisation d’Internet.
- Utilise l’Internet pour échapper aux difficultés ou pour soulager une humeur dysphorique (ex.: des sentiments d’impuissance, de culpabilité, d’anxiété, de dépression).
Si cette grille d’analyse n’a pas fait l’objet d’un consensus scientifique, elle constitue un outil d’aide au diagnostic et peut permettre à certains utilisateurs de prendre conscience de leur pratique excessive d’Internet.
[1] Psychologue américaine reconnue comme une pionnière dans l’étude des usages problématiques d’Internet.
Les écrans deviennent dangereux quand ils nous désintéressent de la vraie vie
Le temps passé,
un signe d’alerte insuffisant
La tentation est grande d’essayer de définir un nombre d’heures à partir duquel l’usage des écrans deviendrait un problème. Certains experts évoquent ainsi 3 heures, d’autres 8 heures de pratique par jour. Mais la réalité est bien plus complexe et nuancée !
Trois facteurs permettent en particulier de déterminer si une personne va trop loin dans sa pratique des écrans :
- elle se sent obligée de se connecter tous les jours (habitude fixe) ;
- elle sous-estime le temps passé et ne parvient pas à s’autoréguler : elle pense se connecter quelques minutes mais y passe en réalité des heures ;
- et surtout -et c’est bien le principal critère- elle délaisse sa vie réelle au profit de ce monde virtuel.
L’usage problématique des écrans se mesure à ce qu’il enlève dans la vraie vie. Amis, famille, travail…
c’est quand tout cela est négligé qu’il faut véritablement s’inquiéter…
Quand le téléphone
nous coupe du monde réel…
Nouvellement entrée dans le dictionnaire, la « nomophobie » désigne la peur excessive d’être séparé de son téléphone ou de rater une information importante sur celui-ci.
Si elle n’est pour l’heure pas reconnue comme une pathologie mentale ou une addiction par la communauté scientifique, cette phobie progresse à grands pas.
Pour savoir si l’on est concerné, il peut être pertinent de se demander en quoi le téléphone portable nous coupe du monde qui nous entoure directement.
Si la réponse est qu’il nous empêche de travailler, d’être disponible pour nos enfants, de passer du temps en famille ou avec des amis, cela peut signifier que l’on a franchi la ligne rouge.
De même, certains symptômes physiques peuvent également être considérés comme des signes d’alerte d’un usage problématique : troubles du sommeil ou de la vision, douleurs aux poignets, ou au dos, problèmes de concentration, irritabilité…
Comment situer son niveau de consommation des écrans connectés ?
Les différents profils
d’utilisateurs
De nombreux psychologues américains ont tenté de définir des profils d’utilisateurs des écrans connectés en fonction de leur relation au virtuel. Parmi eux, Marc Pratarelli a défini trois profils d’usagers d’Internet qui peuvent aider chacun d’entre nous à mieux se situer :
Les raisonnables
Ils n’utilisent Internet que modérément. L’ordinateur est un objet nécessaire, mais non indispensable. Le développement rapide de l’usage d’Internet les inquiète. Ils craignent que ces machines ne prennent le contrôle de nos vies. Ces réfractaires préfèrent les relations directes aux forums. Ils ne ressentent aucune gêne quand ils ne peuvent pas se connecter.
Les dépendants d’internet
Passionnés, ils passent les moments les plus forts de leur existence devant leur écran d’ordinateur. Ils se coupent du monde réel, délaissent leurs amis, leur famille. Leur premier regard matinal est pour l’ordinateur, leur premier geste est de vérifier s’ils ont reçu des e-mails. La nuit, ils rêvent de nouveaux sites et iraient jusqu’à déménager si l’accès à Internet devenait impossible pendant plusieurs jours.
Les accros du cybersexe
Ils recherchent excitation et plaisir sur des sites pornographiques et sont devenus dépendants. Cet usage compulsif d’Internet centré sur les sites sexuels est fréquent et concernerait 20 % des utilisateurs les plus réguliers en France.